Robert Dion
Le biographe salvateur
À propos de quelques « contre-biographies » (Zelda Fitzgerald, Henriette Vogel, John Polidori)
1 Contre-biographie : le mot, qui ne désigne pas même une notion, a de quoi intriguer, tant il est flou, et tant il y a de manières d’aller contre la biographie, ou à son encontre. Une contre-biographie, est-ce quelque chose comme un contre-feu, un texte qu’on écrit pour circonscrire et circonvenir un autre texte plus menaçant ? Est-ce une tentative de désavouer, à la racine, toute entreprise biographique, d’en asserter l’absolue inanité (en y intégrant des éléments en principe inassimilables par elle, comme la fiction par exemple) ? Ou est-ce, plus simplement, une biographie — ou, plus largement, un texte « biographoïde » — qui s’inscrit en faux contre une entreprise antérieure, une reprise biographique placée sous le signe de l’anamorphose (fictionnelle ou non), une certaine forme de métabiographie ? Au sein d’une production pléthorique où, plus que jamais, la nécessité de se distinguer du tout-venant des « écritures du vécu » se fait pressante, sans doute les diverses formes de contestation du discours biographique que je viens d’évoquer constituent-elles autant de stratégies visant à aménager un espace discursif où les réévaluations, les révisions ou encore les reformulations de l’existence du sujet biographié puissent se donner libre cours.
2Si l’on imagine fort bien que les personnages historiques « surbiographiés1 » soient à même de susciter d’innombrables contre-biographies — à chaque génération, à chaque coterie son Napoléon, sa Virginia Woolf —, ceux-ci ne sont pas les seuls à générer une aussi frénétique activité, à mobiliser les justiciers de tout poil, prêts à relever les idoles ou à déboulonner les statues. Il existe également des contre-biographies d’individus négligés2 qui sont écrites, pour ainsi dire, aux dépens des personnages célèbres de leur entourage qui les auraient empêchés de s’épanouir ou qui leur auraient injustement porté ombrage. C’est à de telles entreprises que je m’intéresserai aujourd’hui. J’aborderai en effet la relation biographique en tant que rémunération, de la part du biographe, d’une « injustice » commise à l’égard du sujet qu’il a choisi. À travers l’analyse de quelques exemples portant sur des personnages de la sphère littéraire, récits où il s’agit de réparer un oubli immérité, une occultation volontaire ou une méprise fondamentale, je tenterai de cerner les enjeux d’ouvrages qui visent, peu ou prou, à réhabiliter des figures tenues pour secondaires tout autant qu’à dénoncer les forces qui les marginalisent. Les trois livres que j’ai retenus me permettront d’explorer des cas de figure à la fois apparentés et distincts : le roman biographique de Gilles Leroy, Alabama Song (2007), prix Goncourt 2007, s’inscrit dans une tradition déjà bien établie de réhabilitation de Zelda Fitzgerald, alors que La vocation du bonheur. Journal d’Henriette Vogel, de Karin Reschke ([1982] 1984), mémoires imaginaires de la compagne de suicide de Heinrich von Kleist, extirpe de l’anonymat un être pourtant emblématique de ces « femmes du Romantisme allemand » dont on a fait tant de cas. Quant au roman de Paul West, Le médecin de Lord Byron ([1989] 1991), s’il relève du genre historique comme celui de Reschke et participe, de même, du genre des mémoires imaginaires (encore qu’avec plus ou moins de rigueur, on le verra), il aborde cette fois-ci la figure, moins paradigmatique que celle des « femmes de… », d’un homme relégué aux marges des études byroniennes et, par extension, de la critique littéraire3.
3On remarquera que je n’ai retenu, dans le cadre de cet article, que des fictions biographiques. C’est ce qui me permet d’envisager des entreprises contre-biographiques qui, loin de se borner à renverser la doxa, travaillent le genre lui-même en l’hybridant avec des formes qui le déplacent, en l’occurrence le roman (Leroy) et les mémoires imaginaires (Reschke, West). Il ne serait pas inintéressant, cela dit, d’observer en quoi les hybridations génériques se trouvent à contester la forme même de la biographie : c’est là toutefois un sujet en soi, que je me réserve pour plus tard.
Histoires de femmes
4Si l’on excepte quelques rares écrivaines ayant fait l’objet de plusieurs biographies ou romans biographiques — Colette, Simone de Beauvoir, Gertrude Stein, Virginia Woolf, entre autres —, ce sont pratiquement toutes les auteures et toutes les compagnes d’écrivains qui ont été marginalisées par l’institution littéraire. Pendant longtemps, comme le remarque Carolyn G. Heilbrun dans Writing a Woman’s Life (1988), l’anonymat a été la condition propre et comme naturelle de la femme. Ce n’est qu’au tournant des années 1970, avec l’avènement d’un féminisme attentif aussi bien à la situation présente qu’à l’histoire occultée des femmes, qu’un effort systématique pour constituer un corpus de biographies de femmes écrivains a été mené. L’une des nouvelles biographies « militantes », ouvertement révisionnistes, qui a eu le plus d’impact sur l’ensemble de la production a justement été consacrée à Zelda Sayre, alias Zelda Fitzgerald, par Nancy Milford (1970). Leroy la mentionne au reste comme l’une des sources d’Alabama Song (AS : 1904). L’importance de cette biographie est attestée par de nombreuses observatrices de la scène littéraire féministe. Linda Wagner-Martin, dans Telling Women’s Lives, note par exemple ceci : « Milford’s book challenged everything people thought they knew about the flamboyant writer and his wife by placing Zelda at the center of the canvas and arranging husband, child, family members, and friends around her in clearly subordinates roles » (Wagner-Martin, 1994 : 135-136). Pour Heilbrun, cette biographie aurait révélé que Francis Scott Fitzgerald estimait avoir des droits sur la vie de Zelda à titre de propriété artistique : « She went mad […] to be storyless », conclut-elle à la suite de Milford (Heilbrun, 1988 : 12).
5On ne peut certes affirmer que le roman biographique de Leroy relègue Francis Scott Fitzgerald dans un « rôle clairement subordonné » ; mais il pallie en tout cas la « storylessness » de Zelda en lui confiant la narration de sa propre histoire, lui donnant ainsi une seconde chance après l’échec relatif de son unique roman autobiographique, Save Me the Waltz (1932). Nettement mise en relief5, la visée de réhabilitation passe ici par l’adoption d’un pari narratif à la fois assez répandu et plutôt inusité. S’il n’est pas rare de voir un homme s’installer dans la conscience d’une femme et en particulier d’un personnage historique féminin — la ventriloquie, transgenre ou non, étant l’un des dons les plus répandus parmi les romanciers-biographes6 —, il est plus rare en revanche que ce soit en usant de manière aussi capricieuse de la chronologie et, par ricochet, de la linéarité du récit, au risque de dénoncer l’artifice au principe de la narration et de fragiliser la fiction de mémoires suivis.
6La narratrice d’Alabama Song, c’est-à-dire Zelda, semble en effet planer au-dessus de son récit : le plus souvent, elle l’envisage à travers la lorgnette de sa situation de 1940, en narration ultérieure, alors qu’elle se trouve au Highland Hospital7 et qu’elle écrit son histoire ou la raconte à son thérapeute ; mais aussi, de temps à autre, elle relate les faits en narration presque simultanée, à partir de son point de vue de 1918, 1919, 1920, etc.8 Adoptant la vision de Zelda, percevant les événements par ses yeux, l’auteur ne se borne donc pas pour autant à une perspective fixe : il tourbillonne plutôt autour des événements, les saisissant tantôt dans ce qui semble être leur objectivité brute, tantôt à travers le prisme de la « folie » de son modèle. Le texte ne mime par conséquent ni une autobiographie classique, ni des mémoires ou un journal au sens strict. La main du romancier est partout visible à travers la fiction d’une narration autodiégétique — si bien que celle-ci, tout à la fois, procède de Zelda et la dépasse. Sur le plan même du dispositif narratif, on ne peut dire qu’on a absolument accès à Zelda « par elle-même » ; c’est elle et ce n’est pas elle, elle se dit et elle est dite, elle se justifie et, en même temps, elle se voit justifiée par une discrète instance extérieure.
7Écrire la vie de Zelda Fitzgerald depuis sa perception à elle, c’est aussi forcément, jusqu’à un certain point, réécrire les romans de Scott, c’est-à-dire re-fictionnaliser — voire romancer — ses (auto)fictions à lui. Leroy en a clairement conscience lorsqu’il confie à Lucie Cauwe : « je me retrouve à la fois dans les personnages de Zelda et de Scott. Je me suis scindé dans cette histoire. Bien que ce soit raconté du point de vue de Zelda, j’y ai mis aussi beaucoup de Scott » (cité dans Cauwe, 2007 : n. p.). Et pour cause : ce qu’on sait de Zelda et de sa relation à Scott, on le tient quand même aussi des écrits, transposés, du second. L’une des thèses d’Alabama Song est d’ailleurs que les œuvres des époux Fitzgerald — car, selon Leroy, on peut indéniablement parler d’une « œuvre » de Zelda9 — sont bien plus intriquées qu’on ne le croit en règle générale. Dans le chapitre intitulé « 1932, la Paix » (AS : 128-133), on voit les deux protagonistes s’accuser mutuellement de vol littéraire, preuve s’il en est de la proximité de leurs démarches respectives. Scott accuse Zelda de vouloir exploiter dans son roman10 plusieurs éléments de Tender Is the Night, le chef-d’œuvre auquel il travaille depuis des années ; Zelda reproche à son époux d’avoir utilisé de larges pans de sa vie, de l’avoir en somme vampirisée et, plus grave encore, d’avoir pillé son journal intime, ses manuscrits, de s’être approprié des nouvelles qu’elle avait écrites.
8Malgré quelques concessions à la vision de Scott, il n’en demeure pas moins que la perspective générale, dans Alabama Song, est inversée : du portrait de Zelda en folle-qui-empêcha-le-grand-génie-d’écrire ou qui-l’obligea-à-prostituer-son-talent, on passe à celui de Zelda en écrivaine contrariée, empêchée. Autre inversion : c’est cette dernière qui, cette fois, transforme Scott en chair à canon littéraire ; l’écrivain des « roaring Twenties » est décrit comme un impuissant, un cocu jaloux, un exploiteur des malheurs et des talents de sa femme, un homosexuel refoulé, un auteur « alimentaire » dont les réserves de talent furent tôt dissipées. Mais tout ne consiste pas chez Leroy, cela dit, à renverser les idées reçues ; il y a parfois, par rapport à la vulgate11 diffusée par les biographies du couple, de simples déplacements d’accent. Leroy paraît entre autres majorer la dimension sexuelle, faisant de celle-ci un facteur déterminant de la chute des Fitzgerald. La présomption de rapports homosexuels entre Scott et Ernest Hemingway12, par exemple, est très appuyée ; la courte aventure que Zelda eut peut-être avec l’aviateur français Édouard Jozan est transformée en une liaison significative ayant conduit à une grossesse puis à un avortement ; Zelda dit avoir toujours su intimement que Scott n’aimait pas les femmes ; celui-ci accuse sa femme d’avoir été l’amante de sa professeure de ballet, etc. Cette omniprésence de la sexualité et de ses misères, si elle rend compte de la « modernité » des personnages biographiés, semble faire écho à une question plus large, qui lie le rapport de domination sexuelle à une domination intellectuelle stérilisante et potentiellement mortifère. On trouve confirmation de cette idée dans un curieux dernier chapitre qui constitue une manière d’épilogue au roman13. Ce chapitre met en scène l’auteur, Gilles Leroy, sur les traces de son modèle à Montgomery, Alabama. Ce pèlerinage assez convenu, où l’affection du biographe pour son héroïne trouve à s’exprimer sans le détour de la fiction, est l’occasion d’exposer un ressort autobiographique à l’origine de la relation biographique : une similarité entre la situation initiale de Zelda et celle du romancier qui, lui aussi, fut aux prises avec quelqu’un qui, l’aimant mal, voulut l’empêcher d’écrire ; avec un amant qui, en lui faisant lire des génies écrasants (Faulkner, McCullers), tenta de le décourager de s’adonner à l’écriture et qui, sans savoir qu’il agissait exactement dans le sens contraire de son désir, lui fit découvrir « un couple hors norme, les Fitzgerald » (AS : 187). L’histoire de cette femme qui écrivit malgré tout, et en particulier parce son mari avait trop de talent, fut en définitive l’inspiration même de son futur biographe. Entre l’écrivain homosexuel soumis à l’interdiction d’écrire d’un amant dominateur et l’épouse condamnée au silence, ou à la danse et à la peinture14, il est un parallélisme tel que raconter l’histoire de l’une revient, au total, à plonger dans la sienne propre.
9Écrit par une femme, La vocation du bonheur s’attache à un personnage plus marginal que celui de Zelda, moins flamboyant aussi. Mais il y a des points communs entre les deux livres, et qui se retrouvent dans d’autres biographies contemporaines de femmes : l’écriture de la maladie15, par exemple — qui apparaît plus ou moins comme la somatisation des conflits liés à une condition sociale intolérable —, ou celle de la relégation des femmes à la sphère de l’intimité. Plus que celui de Leroy, le roman de Karin Reschke montre que le récit de la vie d’une femme ne saurait adopter le canevas formel de l’histoire officielle, c’est-à-dire celui d’une écriture de la quête ou de l’aventure16. Henriette Vogel, en effet, ne pouvait être qu’une héroïne de la vie domestique. Prenant acte de ce fait, l’écrivaine allemande invente la fiction d’une écriture privée, un journal intime en l’occurrence. Se coulant dans une figure historique marginalisée, elle relève le défi de la faire parler, de donner une œuvre à une femme sans œuvre. Elle se cantonne cependant dans son personnage avec davantage de rigueur que Leroy dans le sien, faisant voir de l’intérieur, et de l’intérieur uniquement17, de quelle façon une femme tente de se libérer au moyen d’une écriture possible — au lieu de tenir un « discours sur » cette libération18.
10Henriette Vogel n’est pas une écrivaine à proprement parler, bien qu’elle ait laissé des lettres et qu’elle ait, selon des témoins de son temps, produit quelques écrits intéressants qu’elle aurait brûlés avant sa mort. Plus que sa modeste production littéraire, ce qui lui vaut de figurer au sein de l’aréopage des femmes du Romantisme allemand, c’est son amitié avec Kleist et son suicide avec lui. Largement oubliée, elle n’apparaît, dans les histoires de la littérature, qu’en note de bas de page à la biographie de l’auteur de La marquise d’O. Élaborant, à rebours des critiques et des historiens, un contre-discours visant à restaurer l’expérience négligée des femmes, Reschke imagine une parole qui s’incarne dans la forme familière d’un journal où Kleist ne représente qu’un personnage secondaire, arrivé tard dans la vie d’un être qui écrit depuis sa jeunesse, simple instrument qui permet à Henriette d’accomplir son destin19. On sait en effet qu’Henriette Vogel souffrait d’un cancer de l’utérus et qu’elle était vouée à une mort douloureuse, si bien que la proposition de suicide de Kleist ne pouvait, d’une certaine façon, qu’entrer dans ses plans, l’affermir dans sa liberté de grande malade20. Le livre est ainsi fait que nous lisons d’abord le récit, par Henriette, de l’escapade ratée à Auras puis du voyage à Potsdam où sera accompli le double suicide ; l’héroïne y raconte entre autres comment Kleist insiste pour qu’elle lui confie son journal, ce à quoi elle acquiesce finalement (malgré le fait qu’elle craigne sa condescendance — VB : 8). Le journal remonte à l’an 1798 et se poursuit, avec des interruptions, jusqu’en novembre 1811, nous reconduisant au début de la narration. Ce texte, nous en prenons connaissance comme si nous étions Kleist à qui Henriette l’a confié ; nous voyons s’y déployer l’histoire d’une enfant joyeuse qui devient épouse et mère, qui doit composer avec les aléas de l’histoire (l’occupation française à Berlin) et de sa propre histoire (les soucis domestiques, le refroidissement des rapports avec son mari, la maladie), qui reçoit dans son salon de grandes figures intellectuelles, dont Adam Müller et, un jour, un certain Kleist, avec qui elle nouera une relation d’amitié tumultueuse. Non seulement l’« autobiographie » de l’héroïne est-elle en grande partie inventée — dans la mesure où Reschke doit colmater, entre les rares repères factuels que nous possédons, les larges brèches de notre ignorance de la vie intime et quotidienne d’une femme à l’époque romantique —, mais la figure de Kleist y est recatégorisée, revue et corrigée, c’est-à-dire décentrée, aperçue par le truchement d’une observatrice experte et sans complaisance, et surtout ramenée à des proportions plus humaines, Kleist n’étant pas dépeint comme le Romantique ombrageux et génial que la postérité a retenu, mais comme un jeune noble insatisfait et taciturne, socialement inapte, écrivain malheureux et ignorant des femmes21. Le renversement de perspective est ici radical : la « marge Vogel » est placée au centre, le « centre Kleist » rejoint la marge.
11Le choix d’une femme de l’ère romantique par une écrivaine contemporaine ne relève évidemment pas du hasard : le Romantisme allemand, comme le rappelle Donna L. Hoffmeister, a abordé la question du rôle et des capacités des femmes — en la laissant toutefois irrésolue (1984 : 3). Toujours selon Hoffmeister, Reschke, et incidemment Christa Wolf dans Kein Ort. Nirgends (1979), parviennent à une nouvelle compréhension des apories politiques du Romantisme, de ce qui fut, pour les femmes, une « non-révolution » qui conduisit des êtres comme Henriette Vogel et Caroline von Günderrode au suicide (Hoffmeister, 1984 : 4). Les destinées de ces deux femmes montrent en effet le lien étroit entre le privé et le politique, ce lien dont plusieurs biographes féministes ont voulu illustrer la prégnance à travers la reconstitution de diverses trajectoires de femmes plus ou moins connues22. Ainsi, le fait que le suicide d’Henriette Vogel soit évoqué tout au début du livre de Reschke — le journal constituant une grande boucle rétrospective23 — rend bien compte du fait que cette vie ne peut être interprétée, et sans doute écrite, que depuis ce suicide24. En s’y prenant de la sorte, l’auteure indique que ces existences de femmes intelligentes, intellectuelles et cultivées, à la charnière des XVIIIe et XIXe siècles en Allemagne, ne pouvaient conduire qu’à une impasse : la « vocation au bonheur », si c’est là celle des femmes, n’apparaît en définitive que comme un leurre dangereux.
Un cas de vampirisme
12 Le médecin de Lord Byron est un roman biographique qui passe par la narration d’un comparse25, John William Polidori, médecin personnel du poète que John Murray, l’éditeur de Byron, aurait chargé — c’est un fait historique — de tenir un journal des faits et gestes de celui-ci à l’occasion d’un périple sur le continent européen26. Peu à peu cependant, la teneur du journal — qui se révèle en fait en un récit non daté, beaucoup plus proche des mémoires — se modifie, le médecin se révélant bien davantage fasciné par les passions et par la force créatrice byroniennes que par sa santé ou par ses actions, puis de plus en plus par l’influence de Byron sur lui-même, avant de se mettre à ressasser, à la suite de son éviction du cercle des intimes du poète, sa condition de banni. D’abord voués au portrait du grand homme, les mémoires fictifs se tournent ainsi progressivement, par la force des choses, vers la figure du scripteur27.
13Les données à la base de l’édifice fictionnel, cela dit, sont rigoureusement exactes. Polidori a effectivement accompagné Byron sur le continent ; il a passé l’été 1816 avec lui et les Shelley sur les bords du lac Léman, dans la Villa Diodati ; il a bel et bien tenu un journal de cette période, en grande partie détruit par sa sœur Charlotte qui le jugeait trop leste28 ; il a participé à la joute qui consistait, pour chacun des familiers de la Villa, à écrire une histoire d’horreur et qui déboucha, pour lui, sur l’écriture du Vampire d’après une esquisse abandonnée de Byron et, pour Mary Shelley, sur Frankenstein ; enfin, au terme de cet été 1816, il a été congédié sans trop de ménagements par Byron, a voyagé en Italie, est finalement retourné en Angleterre où, selon toute vraisemblance, il s’est enlevé la vie à l’âge de 26 ans. Sur ce substrat événementiel29, West édifie une fiction qui ne rompt pas le tissu des faits avérés, mais qui s’y insère. C’est bien sûr la vie de Polidori, nettement moins connue que celle de son compagnon, qui offre le plus de prise à l’invention ; et c’est elle qui, au fil des pages, est mise au premier plan, même si, de l’aveu du principal intéressé, elle ne prend sens que dans le rapport à Byron. Polidori, d’ailleurs, ne cesse de se reprocher de parler de lui-même plutôt que du génial poète, craignant par là, non sans motifs, de mécontenter l’éditeur Murray, le commanditaire du journal ; il n’hésite pas non plus à se qualifier lui-même d’« invention gênante » (MLB : 15) pour le fougueux Byron.
14« Invention », la figure de Polidori ne l’est pas à strictement parler ; et le procédé narratif par lequel le jeune médecin nous donne son point de vue sur Byron est certainement plus commode que « gênant ». Là où l’invention, toutefois, ne fait pas défaut, c’est en ce qui concerne la reconstitution de la conscience de Polidori (même si le journal réel de ce dernier, quoique lacunaire, et sa correspondance sont mis à profit par West). Au départ, on nous fait voir de l’intérieur le désir de celui-ci, peut-être sacrilège, de remonter aux sources du génie : « Je n’étais pas à l’affût de curiosités médicales, écrit Polidori, mais bien plutôt de preuves de magie. J’avais envie de voir les chemins où le génie avait coulé, fusé, jailli » (MLB : 32). West nous le montre « captivé » par les idées de son compagnon de voyage (MLB : 46), sinon « capté » par lui : « confident subjugué » (MLB : 47), dit encore le texte, « éjecté de [s]on moi le plus stable » (MLB : 53). L’auteur de Childe Harold va du reste encore plus loin que le narrateur dans l’évocation de la dépossession de soi qu’aurait subie son médecin : « Le docteur Polidori, […] étant dépourvu de biographie personnelle, a été choisi pour écrire la mienne » (MLB : 90), dit-il. Polidori en vient même à se considérer tel « un nouveau Boswell qui rôdait autour de Lord B. comme Boswell, le têtard, rôdait autour de la baleine nommée Dr Johnson » (MLB : 132).
15Parce qu’il lui apparaît assez tôt qu’il ne pourra s’approcher de Byron autant qu’il l’avait souhaité, Polidori est donc amené à quitter le terrain de l’observation pour pratiquer l’introspection. Si Le médecin de Lord Byron est, pour parler comme Madelénat, un « roman du biographe30 », il met surtout en scène, et en abyme, les ratés de la démarche biographique : sous ce rapport, on a affaire à un texte hautement déceptif31. Dans un article récent, Julie Aucagne insiste avec raison sur le fait que le regard sur le monde de Polidori et son accès à la création sont « faussés par son statut de biographe », l’écriture biographique étant, pour sa part, « gênée par son aspiration à la quête de soi — et à la littérature… » (Aucagne, 2007 : 331). Or, ce que l’on perd d’un côté, on le gagne de l’autre, le texte donnant accès à une pulsion biographique forcée de se transmuer en pulsion autobiographique. Le récit de soi reste néanmoins, et paradoxalement, à distance, Polidori continuant de se percevoir sous l’éclairage byronien32 — c’est ce qui assure l’unité du roman après que la figure du poète s’est éclipsée — et ne dédaignant pas de se désigner parfois, de manière ironique, à la troisième personne, comme s’il était une créature du poète, une sorte de créature du Dr Frankenstein.
16Quoique le jeune médecin reste dominé par Byron, il n’en contrôle pas moins la narration et, partant, le récit. Ici aussi, West corrige les effets d’un rapport de forces a priori trop inégal. Polidori demeure la véritable figure de proue du roman33, c’est sa biographie qu’imagine l’auteur avant même celle de Byron. Par le biais de la narration d’un épisode de la vie du poète romantique anglais, c’est d’abord l’histoire de Polidori qui est relatée, écrivain oublié mais influent34 dont les œuvres, quelque médiocres qu’elles soient, nous ramènent à une personnalité fascinante — pour West tout au moins. Entre Byron et Polidori, c’est une relation de vampirisation réciproque que met en scène le romancier, le médecin tentant d’abord maladroitement de s’approprier l’écrivain, avant d’être lui-même investi puis détruit de l’intérieur par ce dernier.
17Tout en ayant conscience de se situer du côté du « médiocre » incapable de se placer à la hauteur du génie incarné par Byron et même par Shelley, le lecteur est forcé de voir le quatuor de la Villa Diodati avec les yeux de Polidori et de considérer la bassesse de Byron, ses conduites ignobles, son égoïsme destructeur. L’artifice romanesque est ici plus efficace que ne l’aurait été une démarche purement biographique : le témoin est placé à côté du grand homme, il ne prétend pas à l’objectivité, mais au contraire laisse constamment affleurer sa sensibilité blessée ; il est dans l’histoire qu’il raconte, personnage pitoyable parfois, qui demande l’amitié et la considération d’un mentor qui souvent les lui refuse cruellement. La charge critique est d’autant plus forte que le point de vue n’est pas celui d’un biographe objectif tapi dans l’ombre, juge olympien toujours suspect, mais celui d’un protagoniste dont le lecteur peut à la fois évaluer le témoignage et la crédibilité (en fonction de son ethos, de son implication dans l’histoire35) : le foyer d’évaluation de la persona de Byron et de son entourage reste ainsi bien visible, un peu à la manière des sources lumineuses sur une scène brechtienne. Il demeure toutefois que le cadre énonciatif n’est pas absolument net, qu’il conserve une part de mystère et d’invraisemblance, Polidori racontant, au terme de ses mémoires, son propre suicide : tout se passe comme si, in extremis, le roman voulait brouiller la trop grande transparence de son dispositif énonciatif et rendre ambigu tout ce qui a été dit précédemment. Les biographies emboîtées de Polidori et de Byron se donnent en fin de compte pour ce qu’elles sont : des transpositions lourdement grevées par des procédés fictionnels.
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18J’aurais évidemment pu choisir d’inclure dans mon corpus des biographies stricto sensu qui auraient, elles aussi, tenu un discours allant à contre-courant de ce qu’on croit savoir des personnages de l’entourage des héros de l’histoire littéraire. Si j’ai privilégié des fictions biographiques, c’est que de tels ouvrages s’érigent à partir du principe, théorique bien sûr, d’une biographie à la base impossible. Or, si la biographie d’Henriette Vogel apparaît improbable en raison même du manque de renseignements sur les circonstances de son existence en-dehors de Kleist36, il est en revanche tout à fait possible de biographier Zelda Fitzgerald et John Polidori ; mais pour Leroy comme pour West, il semble que de telles biographies ne puissent être écrites qu’au détriment de leurs modèles, que le risque de satellisation soit à ce point élevé qu’il vaille mieux parler depuis leur lieu même, dans une énonciation autodiégétique fictive. La question de la satellisation d’un personnage secondaire par un personnage plus central est d’ailleurs au cœur d’Alabama Song et du Médecin de Lord Byron ; mais alors que la narratrice Zelda écrit pour se déprendre des rets de Scott, Polidori, lui, écrit plutôt pour dire sa captation par l’astre byronien.
19Le roman biographique tel qu’il est pratiqué par Leroy, Reschke et West permet au surplus de combiner biographie « libre » et autobiographie fictive, sans renoncer pour autant aux jeux de points de vue de la fiction. De vies souvent vues comme « chétives » parce que ce sont celles de personnages méconnus (Vogel), réduits à des poncifs (Zelda), expropriés de leur propre existence (Polidori), ce genre parvient à restaurer le chatoiement, la multiplicité des facettes. S’agissant de femmes confinées à la maison ou à l’asile, ou d’un homme assujetti à un génie qui fit tout pour l’écraser, le roman peut réussir à dire ce qui fait la complexité de ce type d’expérience. Si l’histoire d’une vie, pour paraphraser Victoria Glendinning, est à la fois ce qui vous arrive, ce que vous sentez qu’il vous arrive et ce que les observateurs voient qu’il vous arrive (citée par Wagner-Martin, 1994 : 38)37, alors il ne fait pas de doute que la fiction biographique permet idéalement de passer de l’un à l’autre de ces plans, de les prendre ensemble pour concevoir un « objet » dialogique qui puisse échapper au figement idéologique et, du coup, être parcouru dans tous les sens.
Notes
1 « Les tombeaux panthéoniques sont saturés de mots, les personnages majeurs (Alexandre, Jésus, Jeanne d’Arc, Napoléon...) sont “surbiographiés” (surtout quand la mode gagne à la confection de “vies” maint journaliste ou écrivain “généraliste”). Les produits doivent donc se différencier et se sophistiquer ; ils fuient un centre surpeuplé ; ils jouent sur des matériaux, des techniques, des alliances qui stimulent la curiosité du public » (Madelénat, 2000 : 158).
2 Négligés jusqu’à nouvel ordre toutefois : car il n’y a rien comme une biographie — bonne ou mauvaise — pour en susciter d’autres.
3 Désormais, les renvois à ces trois ouvrages seront signalés par les mentions AS, VB et MLB, suivies du numéro de page.
4 Cette mention est faite dans la « Note de l’auteur » à la toute fin du livre.
5 Lors de la cérémonie d’attribution du prix Goncourt, Leroy a affirmé : « Ce prix, c’est aussi pour elle, qui a été sacrifiée, pas reconnue à son juste talent » (cité dans Cauwe, 2007). La « thèse » de Leroy est exposée dans une espèce de prologue en italique : « Il en est qui se cachent pour voler, pour tuer, pour trahir, pour aimer, pour jouir. Moi, j’ai dû me cacher pour écrire. J’avais vingt ans à peine que déjà je tombai sous l’emprise — l’empire — d’un homme à peine plus vieux que moi qui voulait décider de ma vie et qui s’y prit très mal » (AS : n. p.).
6 Voir à ce sujet l’article bien connu de Philippe Lejeune sur les mémoires imaginaires (1989).
7 Où elle mourra, brûlée vive, en 1948.
8 La datation de la narration, au reste non systématique, parfois redondante par rapport au contenu et parfois non, est d’ordinaire placée en marge du corps du texte. Il arrive aussi qu’elle se retrouve dans les titres de chapitres.
9 Voir à ce propos l’article de Leroy (2008) consacré au roman de Zelda Fitzgerald et publié dans Le monde des livres.
10 Roman qui n’est pas nommé dans le texte, mais qui est Save Me the Waltz.
11 Le terme est bien sûr repris de Pierre Michon (1991), qui l’utilise à propos du discours critique figé sur l’œuvre et la vie de Rimbaud.
12 Nommé Lewis O’Connor dans le roman : il s’agit de l’unique personnage affublé d’un nom fictif.
13 Ce chapitre est le seul d’une partie intitulée « Minuit pile », titre qui renvoie à celui du prologue que je citais à la note 5, « Minuit moins vingt ». Minuit « pile » est l’heure présumée de la mort de Zelda.
14 Formes d’expression que Scott aurait été prêt à lui « abandonner », lui fournissant en effet toiles et couleurs alors qu’il essayait de confisquer ses cahiers.
15 Mentale chez Zelda et physique chez Henriette.
16 Voir à ce sujet Heilbrun (1988).
17 Reschke n’adopte donc pas cette position « dedans-dehors » que Leroy semblait se ménager en complexifiant le dispositif narratif et en datant en marge les fragments des mémoires de Zelda.
18 Dans une étude consacrée au roman de Reschke, Helga Bleckwenn remarque que si Henriette écrit remarquablement bien, aussi bien que Reschke en fait, celle-ci ne lui prête pas un savoir et une conscience qui transcendent ceux de son milieu : « Henriette ist keine zu Unrecht vergessene Mittelpunktsfigur eines romantischen Salons, nach Ausstrahlung und Akzeptanz nicht vergleichbar mit Caroline Schelling, Henriette Herz, Rahel Varnhagen. Sie ist eine Tochter des höheren Bürgertums » (Bleckwenn, 1992 : 232). Je traduis : « Henriette n’est pas une figure centrale d’un salon romantique injustement oubliée, son rayonnement et sa place ne sont pas comparables à ceux de Caroline Schelling, Henriette Herz, Rahel Varnhagen. Elle est une fille de la haute bourgeoisie ».
19 Elle lui imagine en outre une modeste production littéraire : un conte ayant pour titre « L’héritage d’Elvire de Sienne » (VB : 262-272).
20 Pour beaucoup de femmes de l’époque d’avant le féminisme, la maladie est une façon d’échapper à un rôle assigné, de reprendre le contrôle sur sa vie ; Henriette note par exemple ceci : « Il me semble que ma liberté à moi n’existe plus que dans cette chose monstrueuse que je cultive dans mon corps et que je n’ai que la maladie pour échapper à mes devoirs domestiques » (VB : 206).
21 Vogel critique vertement sa Penthésilée, qui met en scène un type de femme — l’amazone — qu’elle récuse absolument.
22 Bleckwenn se demande d’ailleurs si La vocation du bonheur ne serait pas une variation sur Kein Ort. Nirgends (Bleckwenn, 1992 : 229).
23 La construction du livre, on le voit, est très savante, à des lieues d’un journal désordonné et spontané. Dans sa recension du livre, Sybille Cramer parlait d’une « maskierte Biographie », d’une « biographie masquée », qui permettait « die Darstellung des Lebens als Synthese », « la représentation de la vie comme une synthèse » (Cramer, 1983 : 109).
24 Au même titre que, pour la plupart de ses biographes, la vie de Zelda ne peut être envisagée que depuis sa folie.
25 Sur le site de l’Ampleforth College où Polidori étudia la médecine, on parle de lui « as a footnote in Romantic history » — une situation qui n’est pas loin de rappeler celle d’Henriette Vogel (Ampleforth College, page consultée le 13 avril 2008).
26 Au retour de Polidori en Angleterre, Murray refusa de publier l’ouvrage du médecin, le qualifiant de « rhapsodie » où celui-ci parlait davantage de lui-même que de son modèle (Aucagne, 2007 : 330). Au sens large, une rhapsodie, rappelons-le, est une forme poétique ou musicale qui tient du pot-pourri, mêlant diverses formes métriques, divers genres, divers tons et divers thèmes.
27 Le choix de se tourner vers un personnage obscur plutôt que de rester dans le halo de Byron serait typique, selon Anne-Laure Tissut, de la démarche de West dans l’ensemble de son œuvre, déterminée par le désir de rédiger « une Histoire de l’ombre, ou plutôt des ombres » (Tissut, 2003 : 41).
28 Le roman de West, qui reconstitue en quelque sorte un canevas de journal possible, est en effet assez égrillard et s’attarde longuement sur les organes sexuels des uns et des autres, sur les prouesses de Byron et de Polidori (avec une prostituée, notamment), etc. La version censurée et recopiée du journal par Charlotte a été publiée par le neveu de Polidori, Michael William Rossetti, en 1911 (Londres, Elkin Matthews).
29 Qui n’entre en contradiction avec aucun fait bien connu de la vie de Byron : celui-ci se retrouve dans le roman avec son pied bot, sa sexualité exubérante, ses penchants homosexuels, son amour pour sa demi-sœur, et ainsi de suite.
30 « Défini par son thème (un journaliste, un universitaire, un admirateur, un ami se livre à des investigations documentaires ou directes sur une personne déterminée en vue d’écrire sa vie), par son énonciation et sa focalisation centrées sur le biographe, par son système actantiel (la réussite ou l’échec de l’acte biographique, avec opposants, adjuvants, destinataires variés, destinateurs qui commandent l’ouvrage ou lancent l’entreprise), le roman du biographe est un sous-genre hybride : il croise des traits du roman gnoséologique où un enquêteur (policier, espion, etc.) tente de découvrir les causes dissimulées d’une réalité apparente par l’observation, l’inquisition, la filature, le raisonnement, et des caractères du roman réflexif où l’écrivain met en abyme l’acte d’écriture, le work in progress, les étapes du livre (à la manière de Gide dans Paludes et Les faux-monnayeurs) » (Madelénat, 2007 : 71).
31 « Le type de journal que j’avais tenu était sans utilité pour Murray et maintenant ma chance était passée : je l’avais gâchée, gaspillée » (MLB : 263).
32 « Tout à coup, je compris, note Polidori : j’avais figuré dans une scène de sa vie, et non point lui dans une scène de la mienne » (MLB : 317).
33 « [L]e changement de perspective imposé par le choix du médecin comme narrateur aboutit à un récit voué à celui même dont on croyait détourner les regards » (Tissut, 2003 : 43).
34 Le vampire, histoire publiée par Polidori en 1819, fut une source d’inspiration pour Bram Stoker, le créateur de Dracula. La critique littéraire anglaise tend à lui dénier même la paternité de cette œuvre : « Both the fiction itself and the facts surrounding its invention, re-creation, and publication demonstrate the essential vampirism inherent in the powerful influence of a strong talent on a weak one » (Skarda, 1989 : 249-250).
35 Polidori note par exemple : « Moi qui entendais tout (et Murray savait qu’il en irait ainsi), j’aurais dû en noter davantage dans mon journal, de façon à gagner mes cinq cents guinées. J’aurais dû être moins fasciné par sa présence, par le miroitement de son cynisme arrogant ; mais j’étais bouche bée du matin au soir, en bon subalterne, en vrai novice, car en vérité je m’amusais trop (et souffrais trop) pour être l’honnête secrétaire, sans parler de sa fréquentation intime, à haute dose, qui transformait ma nature, quelles que fussent les inventions de mon esprit en sa présence » (ML : 34).
36 À ma connaissance, il n’existe pas de biographie de cette femme.
37 La citation exacte est : « Is the story of your life what happens to you, or what you feel happens to you, or what observers see happening to you ? »
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